De septembre à décembre dernier, quatorze policiers ont suivi la formation de la Force d’intervention de la Police nationale (FIPN) pour le RAID, les GIPN et la BRI-PP.
Parcours de Bruno C., policier rhônalpin qui, après avoir passé avec succès les sélections, a été formé à ses nouvelles missions.

Quatre mois après avoir réussi les tests de sélection, quatorze stagiaires de la FIPN (RAID, GIPN et BRI-PP), dont Bruno C., sont convoqués début septembre 2011 pour quatorze semaines de formation. Le programme s’annonce chargé et le rythme soutenu : tir, GTPI, protection rapprochée, surveillance-filature, tir de haute précision, habilitations aux armes non létales (MBD, Taser), intervention…
 

Septembre 2011 – Yvelines

Après une semaine au centre national de tir de Montlignon, treize stagiaires sur quatorze ont été déclarés aptes au premier module de tireur qualifié à l’arme de poing. La suite des événements va vite les plonger dans l’inconnu avec une formation de quinze jours sur la surveillance-filature. “Les stagiaires étaient totalement novices en la matière, explique Gilles G., chef adjoint à la section appui opérationnel du RAID.
Ce fut pour eux la découverte progressive d’un nouveau métier, avec des techniques particulières et une attitude spécifique à tenir. Car la moindre faute d’inattention peut remettre en cause des mois de travail de plusieurs personnes.” Quatre jours de cas pratiques réglés au millimètre ont clôturé ce module au travers d’un scénario tout à fait crédible : sur la base d’une information d’un service de renseignement, un présumé terroriste a été localisé, identifié et surpris en plein repérage aux alentours de la tour Eiffel. La mission confiée au groupe est d’identifier ses éventuels complices, de vérifier la nature de son objectif et finalement de neutraliser le ou les protagonistes. “Cet exercice fait appel à leurs capacités de réflexion, d’organisation, de gestion du stress et d’adaptation, continue Gilles G. En “filoche”, c’est la loi du terrain qui va justifier notre engagement.”

Durant ce test, trois réservistes de la Police nationale, limiers de la police judiciaire rompus à la filature, ont joué les “plastrons”, confrontant les stagiaires à tous types de situations : métro, voiture, train et à pied, de nuit comme de jour, de la banlieue parisienne à la place Vendôme. “En filature, il faut sans cesse improviser, s’adapter à l’environnement et rester le plus naturel possible, souligne un des “filochés” aux vingt ans de pratique. Ils s’en sont bien sortis, d’autant que nous ne leur avons fait aucun cadeau, comme de sortir précipitamment d’une rame de métro. C’est très important pour nous de transmettre notre expérience aux plus jeunes.”
L’objectif n’est pas de faire des hommes de la FIPN des professionnels de la filature, mais de leur faire maîtriser rapidement les bons gestes et acquérir une base technique qu’ils développeront ensuite dans leurs unités. À l’issue de la journée, le débriefing de Gilles G. met l’accent sur les défauts observés : “Profitez de la foule et de votre environnement. Donnez des indications précises en voiture. Évitez de dévisager votre cible, surtout avec un air patibulaire ! Pensez à ce que vous pouvez apporter au dispositif, arrangez les choses, complétez-vous !”

Septembre 2011 – Région parisienne

Nouvelle découverte d’une mission des services d’intervention de la Police nationale : la protection rapprochée. Après un cours sur ses spécificités, le rôle de chacun dans la “bulle” de protection et du vocable adéquat (précurseur, flancs gauche et droit, élément avancé…), un test grandeur nature est organisé pour tester les stagiaires : gérer la protection de A à Z d’un VIP, en l’occurrence un homme du RAID qui ne se prive pas de tenter de déstabiliser les novices : jogging improvisé, rendez-vous impromptus qui s’éternisent, conduite rapide sur l’autoroute, fausse attaque au fusil d’assaut et à la grenade… “Ainsi, nous leur faisons toucher du doigt les difficultés de ce métier, déclare David S., formateur au RAID. Il n’existe pas d’équipe dédiée à cette spécialité au sein de l’unité, tous les membres du service sont susceptibles de protéger un jour ou l’autre un sportif, un chef d’État, une personnalité étrangère, un ambassadeur, un juge ou un témoin…” Les stagiaires se plient sans coup férir à l’exercice et suivent partout leur VIP, tout en restant le plus discret possible.
Pour Bruno C., ce premier mois de stage aura été riche d’enseignements : “Chaque semaine fait appel à des qualités différentes et bien précises. Il faut arriver comme une éponge, s’ouvrir aux formateurs pour prendre le maximum d’informations. Le plus difficile est de retranscrire ensuite l’enseignement sur le terrain en conditions réelles : se mettre dans la peau d’un tireur de haute précision, adapter son comportement à la filature, être aux aguets pour protéger un VIP. Il me faut parfois adopter des comportements aux antipodes de ce que j’ai pu pratiquer auparavant.”

Octobre-novembre 2011 – Saclay et Bruyères-le-Châtel (Essonne)

Le module le plus important de la formation, l’intervention, est aussi le plus long (quatre semaines). “Nous les préparons aux trois opérations de police que sont amenés à effectuer le RAID, les GIPN et la BRI : l’interpellation à domicile, la prise d’otages, la maîtrise d’individus retranchés ou forcenés, poursuit Philippe B. Chaque opération a ses propres mode opératoire et rythme, c’est sur ces bases qu’on essaie de les amener à un certain niveau. Par exemple, sur la prise d’otages, le mode opératoire peut être un assaut ou une intervention planifiée. Pour libérer des otages, on sait que le rythme est très soutenu, adapté de façon à libérer les otages le plus rapidement possible.”Une fois de plus, les formateurs de la FIPN confrontent leurs élèves à plusieurs cas pratiques pour les sensibiliser aux réalités du terrain et organiser leur colonne d’assaut dans des conditions difficiles. Un premier test est réalisé sur le site de la direction générale de l’armement de Saclay. Des terroristes retiennent en otage les deux enfants d’un riche industriel dans un endroit complexe, “un véritable labyrinthe” selon l’un des encadrants. Les “précurseurs” ouvrent le chemin de la colonne d’assaut dans ce site immense, idéal pour un guet-apens. Chacun tient sa place, joue son rôle. Une solide cohésion se dégage déjà de la colonne. L’assaut est donné dans un local plongé dans le noir, dans lequel de nombreux plastrons ont été disséminés.
Après plusieurs minutes vécues sur un rythme trépidant, Bruno revient sur ce baptême du feu fictif. “Entre les efforts de concentration et l’engagement physique, courir un marathon est de la rigolade à côté d’un assaut ! Il faut trouver un savant compromis entre la discrétion totale et le fait d’arriver à libérer les otages. Le secret est de communiquer sans cesse entre membres de la colonne.”
Une semaine plus tard, c’est au commissariat à l’énergie atomique (CEA), à Bruyères-le-Châtel, que les corps des stagiaires sont mis à contribution, avec le module intervention équipé d’un appareil respiratoire isolant (ARI). “Nous leur montrons que cet appareil sera leur seule protection possible contre un feu ou un incendie, déclare Philippe B., responsable intervention-incendie au CEA. Il leur permet de progresser là où l’air est vicié et de se protéger de toute explosion éventuelle. Nous en profitons également pour les sensibiliser aux risques liés aux feux.” La formation organisée avec le CEA découle de cas réels d’interventions auxquels le RAID a été confronté : en 2006, à Limay (Yvelines), un forcené avait mis le feu aux archives du bureau de Poste, menaçant la vie des cinq otages retenus ; en 2007 au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), un individu suicidaire menaçait de faire exploser son pavillon avec du gaz en cas d’intrusion de la police. Pour Bruno, cette formation s’est révélée éprouvante : “Le plus dur est de rester concentré sur l’intervention tout en gérant son stress dans un espace pollué. En plus de notre équipement, il faut gérer les douze kilos supplémentaires de l’ARI. Il faut réussir à rythmer sa respiration, car l’autonomie de l’appareil est courte, ce qui accentue d’autant plus le facteur stress.”
Le module intervention est également l’occasion pour les formateurs d’insister sur l’importance vitale de l’esprit d’équipe dans ce type d’unités : “Comme ils interviennent en groupe, si un élément n’est pas “dans le match”, il met en péril non seulement sa propre sécurité en cas d’erreur, mais aussi celle de ses collègues et, le cas échéant, celles des otages, insiste Philippe B. Tous les exercices sont donc organisés en groupe pour créer une  complémentarité et acquérir des gestes réflexes. Ils doivent prendre conscience que seuls ils n’arriveront à rien
 

Novembre-décembre 2011 – Siège du RAID à Bièvres (Essonne)

Les stagiaires de la FIPN entament leur ultime mois de formation avec l’habilitation de technicien d’intervention en hauteur (TIH). Celle-ci est encadrée par trois CRS du centre national d’entraînement à l’alpinisme et au ski (CNEAS) de Chamonix. “Nous leur communiquons des techniques de cordes pour pouvoir se sécuriser lors d’interventions en milieu périlleux du type immeubles, antennes, ponts, monuments… Tous les supports où ils peuvent être amenés à intervenir dans le cadre de leurs missions, explique Éric D., l’un des CRS moniteurs. Nous avons clairement identifié leurs besoins et nous y répondons avec nos techniques issues du secours en montagne ou celles pratiquées en alpinisme, en escalade ou en accro branche.”
“La difficulté réside dans le cumul de deux techniques spécifiques : l’intervention d’un côté et l’escalade de l’autre, complète Frédéric G., l’un des membres du groupe franchissement du RAID. Nous apprenons aux stagiaires à gérer leur armement et leurs protections balistiques, le tout combiné au matériel de protection en hauteur (baudriers, cordes, casque…).”

Décembre 2011 – siège du RAID – Bièvres (Essonne)

Les stagiaires achèvent leur dernier jour de formation avec l’aérocordage depuis un hélicoptère piloté par un gendarme de la section aérienne de Villacoublay. “Nous leur enseignons les techniques de descente en rappel et de corde lisse depuis un hélicoptère, explique Loïc V., spécialiste au RAID du parachutisme et de la varappe. En intervention, cela permet de mettre le plus rapidement possible une équipe d’intervention sur des points hauts inaccessibles.”
Les quatorze semaines sont clôturées par la cérémonie officielle d’intégration. Sur les quatorze stagiaires, onze reçoivent leur habilitation. Trois d’entre eux ont échoué au module de tir de haute précision ; ils ont six mois pour repasser et obtenir cette spécialité s’ils veulent intégrer leur unité. Tous les membres du RAID viennent saluer et féliciter leurs nouveaux collègues, un moment fort d’intégration et de reconnaissance par les anciens. Les désormais néo-policiers d’élite vont maintenant vivre six mois d’observation au sein d’un groupe d’intervention avant de pouvoir éventuellement intégrer la colonne.
Bruno C. revient sur cette expérience unique, débutée il y a plus d’un an avec les tests de présélection : “J’ai le sentiment d’intégrer une famille, avec les obligations, les devoirs et les comportements que cela inclut. La formation nous a appris la polyvalence et l’ambivalence du métier. Je ne suis pas devenu en quatorze semaines un expert en escalade, en filature ou en intervention, mais je me suis rendu compte de l’intérêt primordial, voire vital, de travailler quotidiennement et de sans cesse m’entraîner.”

 


Source : http://www.police-nationale.interieur.gouv.fr/ – © Ministère de l’Intérieur – mars 2012

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