“«J’AI APERÇU le canon d’un fusil entre les deux battants d’une porte coulissante. Puis il y a eu un coup de feu et deux ou trois autres immédiatement après. Le commissaire a dit On s’arrache. Il a descendu l’escalier et s’est écroulé dans l’allée. » La déposition de ce commandant de police qui accompagnait le commissaire Stéphane Lapeyre, grièvement blessé au cours d’une interpellation le 25 septembre 2000 à Argenteuil, éclaire les quelques secondes où la vie du jeune policier a failli basculer.

Touché au thorax malgré son gilet pare-balles, le commissaire Lapeyre, âgé de 28 ans à l’époque, a passé plusieurs jours dans le coma et subi de nombreuses opérations. Il sera aujourd’hui à la barre de la cour d’assises du Val-d’Oise, à Pontoise, pour faire face à Ali Abed, 52 ans, qui comparaît jusqu’à demain soir pour « tentative de meurtre sur personne dépositaire de l’autorité publique ».
Le gilet pare-balles n’a pas résisté
Ce 25 septembre 2000, lorsque Stéphane Lapeyre prépare son dispositif pour aller interpeller Ali Abed à son domicile de la rue Henri-Barbusse, il connaît le lourd casier judiciaire et la réputation de celui que l’on surnomme Ali le fou. Le jeune commissaire ne laisse donc rien au hasard et se rend sur les lieux, gilet pare-balles sur le dos, en compagnie de cinq autres policiers. Comme Ali Abed n’a pas répondu aux précédents courriers lui demandant de se présenter au commissariat pour une affaire d’outrages à magistrat et que les policiers se sont déjà cassé le nez une fois à la porte de son pavillon, un serrurier a été réquisitionné. Il est presque 6 h 30. Le dispositif est prêt. Le commissaire, suivi du serrurier et de trois autres policiers, gravit dans l’obscurité l’escalier qui mène à la porte. Deux policiers sont postés dans la cour en contrebas « en couverture » et pour surveiller les fenêtres. Le commissaire frappe à la porte blindée une première fois. Une dizaine d’autres appels resteront sans réponse. Le serrurier note la présence d’une clé et ressent un « blocage manuel » de l’autre côté de la porte. Pendant qu’il retourne à sa voiture pour chercher une perceuse, les policiers entendent l’occupant donner un tour de clé. Ils tentent à nouveau de parlementer, mais Abed reste muet. Sa porte, elle, continue de résister à la perceuse puis au pied de biche utilisé par le serrurier qui finit par détruire le chambranle.

Il risque la prison à vie
Il est 7 h 15. Le commissaire Lapeyre entre le premier, suivi par un officier. Pendant que les deux hommes se séparent pour fouiller les pièces toujours plongées dans le noir, les deux gardiens de la paix se postent dans l’entrée. L’arme à la main, le commissaire crie « Police » à plusieurs reprises. Quelques secondes plus tard, plusieurs coups de feu retentissent. Stéphane Lapeyre, touché au thorax, tente vainement de riposter avant de sortir du pavillon et de s’écrouler. Son gilet pare-balles n’a pas résisté. La décharge de chevrotine l’a traversé de part en part et le jeune policier souffre d’une importante hémorragie. Il est évacué vers l’hôpital Beaujon de Clichy (Hauts-de-Seine) dans un état critique. Pendant ce temps, Ali Abed s’est retranché chez lui. Il parle d’une femme et de deux enfants qu’il retiendrait en otage sous la menace de balles explosives et de grenades. Une unité du Raid est envoyée sur place. Le forcené exige de rentrer en contact avec ses deux filles placées à la Ddass puis sollicite la présence du consul d’Algérie. Après de nouvelles négociations, il finit par décharger son fusil à pompe Winchester calibre 12 magnum et le jette par la fenêtre à un policier du Raid. Il est 14 heures. Ali Abed est menotté et conduit dans les locaux de la brigade criminelle à Versailles. Déjà condamné à cinq reprises, le forcené encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict des jurés est attendu demain soir. “

 
Source : Le Parisien – article du 21 mai 2002

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