
« Au quotidien, les opérateurs du RAID s’entraînent pour intervenir dans toute situation à risques : forcené, prise d’otage, personne suicidaire armée… Parmi eux figurent des médecins qui progressent au cœur des colonnes d’assaut, prêts à porter secours aux éventuelles victimes, policiers comme civils. Manuel, chef du groupe médical d’intervention du RAID qu’il a intégré en 2013, explique le fonctionnement de ce groupe crucial.

Quelles sont les spécificités des missions des médecins du RAID ?
Contrairement aux autres groupes médicaux classiques, nous pouvons intervenir en zone rouge, c’est-à-dire en zone non sécurisée et interdite d’accès aux civils, dans laquelle on peut potentiellement être blessés par les preneurs d’otages, personnes suicidaires ou individus retranchés. En tant que membres du groupe médical du RAID, nous sommes les primo-intervenants dans cette zone d’exclusion police. Nous portons assistance aux opérateurs du RAID, mais également aux civils et aux assaillants.
Nous sommes intégrés à la colonne et la suivons dans tous ses déplacements, il faut donc être physiquement entraînés afin de ne pas handicaper les opérateurs. Pour notre protection, nous travaillons tous en équipement lourd : entre le gilet balistique, le casque et notre sac médical, nous portons plus de 30 kilos de matériel. Seule la mention « médecin », scratchée dans notre dos, permet de nous distinguer des autres opérateurs.
Nous sommes également chargés d’établir le dispositif de prise en charge et d’extraction des blessés et de contacter, si possible en amont d’une crise, les hôpitaux qui pourraient accueillir les victimes. Nous fournissons donc un dispositif de secours clé en main au commandant opérationnel de la force d’intervention spécialisée.
Quelle est la composition de la cellule médicale du RAID ?
Avec ses 100 médecins au total répartis sur l’échelon central et sur les 16 antennes du RAID, notre cellule médicale est en quelque sorte le plus important SMUR de France en termes de personnels. Nous couvrons l’ensemble du territoire français, aussi bien métropolitain qu’en outre-mer.
Nous sommes tous des médecins urgentistes ou anesthésistes réanimateurs, habitués à gérer les urgences vitales et les prises en charge complexes telles que les chocs hémorragiques ou les détresses respiratoires, les polytraumatisés ou tout type de lésions pénétrantes. Avec mes collègues praticiens, nous savons gérer les situations stressantes puisque nous disposons d’une expérience de 5 à 10 ans dans ce domaine lors de notre recrutement.
Comment sont recrutés les médecins du RAID ?
Pour intégrer le RAID, nous avons tous passé des sélections très exigeantes tant d’un point de vue physique que psychologique. Il est en effet primordial d’être en excellente condition physique et de ne pas souffrir du vertige pour suivre la colonne d’assaut dans tous ses déplacements : interventions en hélicoptère avec rappels et paradroppage, franchissement d’obstacles… Notre présence rassure les opérateurs : ils peuvent progresser en toute confiance en sachant que nous sommes prêts à les soigner si besoin.
Lors des sélections, nous testons la gestion des émotions des candidats ainsi que leur capacité d’adaptation. Nous recherchons l’effet tunnel : en période de stress, comment réagissent-ils ? Savent-ils faire preuve de discernement et raisonner efficacement pour poser un diagnostic alors qu’ils sont dans un bus enfumé, avec plus de 30 kilos de matériel sur eux dont une bonbonne d’oxygène grâce à laquelle ils ont une autonomie limitée ?
Une fois devenues médecins du RAID, les recrues doivent suivre différentes formations : conduite spécialisée, module NRBC (risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques), armement et manipulation des armes… Si un opérateur du RAID est blessé, le médecin doit être en mesure de sécuriser les armes de celui-ci avant de le prendre en charge.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de rejoindre le RAID ?
Mon engagement dans le service public a toujours été une valeur importante à mes yeux. J’ai commencé ma carrière à la Brigade de Sapeurs-Pompiers de Paris en 1998 en tant que médecin urgentiste, j’y ai exercé pendant 15 ans, tout en maintenant une activité parallèle d’accueil des urgences et de SMUR, avant de rejoindre le RAID. C’est un de mes collègues qui m’a appris qu’un poste de médecin du groupe médical d’intervention était ouvert et m’a indiqué que mon profil correspondait. Je souhaitais vivre de nouvelles expériences professionnelles et ai donc passé les tests de recrutement. Le RAID compte environ 500 agents, il y a une fraternité très forte entre tous les membres du RAID, notamment au sein des opérateurs qui réalisent les interventions. Nous sommes soudés par les événements très intenses que l’on vit, comme les attentats de Paris en janvier et novembre 2015, le double assassinat de policiers à Magnanville en 2016…
Être médecin au RAID me permet de servir mon pays en apportant mes compétences à ceux qui le protègent, de vivre une expérience humaine inénarrable et parfois de me dépasser. Je n’aurais par exemple jamais imaginé sauter d’un hélicoptère, escalader une grue, marcher jusqu’au bout de celle-ci par temps de blizzard avant de mettre en place un équipement pour descendre au sol avec l’unique sécurité de mon équipier. »
Source : police-nationale.interieur.gouv.fr
Photo @ Police Nationale