« Créée en 194 pour juguler les équipes de braqueurs violents, la brigade de recherche et d’intervention (BRI) de Paris a ajouté, au fil des ans, de nouvelles cordes à son arc. C’est aujourd’hui un service de renseignement  et l’épine dorsale d’une force d’intervention aux ordres du préfet de police. Et avant tout, un service dans lequel il faut savoir tout faire. Ou presque.
 
Impossible d’éclairer  le côté obscur de la BRI, son travail de documentation opérationnelle  sur le grand banditisme. Un travail qui l’assimile à un véritable service de renseignement , avec lequel, d’ailleurs, la BRI partage quelques points communs (l’anonymat de ses effectifs, le recours aux écoutes administratives, une documentation très développée…). On  n’a jamais lu de reportage authentique sur le fonctionnement  d’un service de renseignement.
 
Impossible non plus de réduire la BRI  à une bande de cowboys enfouraillés, image longtemps cultivée et produite par la presse. Aujourd’hui, à l’heure où l’on crée des « compagnies », des « groupes » spécialisés souvent bien équipés en protection et en armement, la brigade antigang historique a perdu le caractère exotique qu’elle avait il y a encore dix ans.
Impossible , non plus, de limiter son image, à celui d’hommes en noir jaillissant du néant pour réduire un terroriste ou des criminels  chevronnés, car cela ne représente  qu’une part infime du temps de la brigade, même si les entraînements permettent ces interventions.
Non, tout cela est impossible, en fait, à raconter, pour des raisons de discrétion, pour des raisons de réalisme.
Par contre, le constat demeure : aucun autre service n’a réussi à concentrer en son sein une telle polyvalence mariant l’intervention et cette frange inédite du travail de police judiciaire.
Aucun autre service ne détient, non plus, un tel bilan, souvent ignoré.
Et aucun service, ne voit ses anciens « détonner » aussi fortement dans la suite de leur carrière.
 
Nous avons donc choisi de vous faire partager cet instantané d’une brigade emblématique du « 36 », ses évolutions, tout en vous faisant remonter aussi le temps, pour appréhender, sur des affaires réelles, le travail abattu t longtemps laissé dans l’ombre.
 
Première réalité : en 2008, la BRI a réalisé une soixantaine  d’assistances au profit des utres services de la DRPJ, selon Jean-Jacques Herlem, ancien patron de l’antigang, et actuellement  directer adjoint du « 36 ».
C’est une cadence énorme, si l’on considère  que chacune  de ces assistances est précédée systématiquement  d’une reconnaissance, notamment de la part du groupe effraction. C’est aussi  la traduction d’une volonté des services d’avoir recours à des fonctionnaires formés et équipés , « dès  qu’il existe un risque dans l’interpellation d’une ou plusieurs personnes » constate le directeur adjoint du « 36 ».
Cette assistance, qui a fluctué dans l’histoire de la brigade, est une vraie plus-value.
« L’intervention est complémentaire du travail sur les droits communs », ajoute Jean-Jacques Herlem.
L’une se nourrit de l’autre. Mi-janvier, en quelques jours, la BRI balaie l’essentiel e ces capacités Elle est ainsi engagée sur une « filoche » mobilisant une bonne partie de la brigade, puis assiste la 2° DPJ pour l’arrestation d’un homme  qui a poignardé sa conseillère financière. Et le lundi suivant, elle effectue une interpellation, au petit matin, en Seine-Saint-Denis…


 
Le fonctionnaire de la BRI doit savoir gérer son stress, évidemment. Et il doit savoir s’adapter, prendre la bonne décision, si le braqueur change d’avis, remonte dans sa voiture, seulement parce qu’il a vu  quelque chose qui ne lu a pas plu…
Deuxième réalité, la BRI va voir son rôle renforcé en matière d’intervention de crise. Les événements  récents en matière de violences urbaines, avec tirs d’armes à feu (Villiers le Bel), et de terrorisme de masse (Bombay) ont conduit la préfecture de police à densifier sa force d’intervention pour pouvoir parer un spectre élargi de situations.
L’architecture n’avait pas évolué  singulièrement depuis la mise ne place de la Brigade Anti-Comamndo, au quasi-lendemain de la tuerie des JO de Munich (1972).
 
Cette dernière a offert 60 fonctionnaires  sur le papier, lors de l’exercice  « PLM » simulant une prise d’otages massive  (PROM), le 22 décembre dernier. Cela correspond aux deux tiers des effectifs BAC qu’elle pourrait mobiliser en cas de crise.
Demain, la BRI-BAC restera le coeur opérationnel de la force de réaction, mais plusieurs éléments s’agrègent autour d’elle : essentiellement  des appuis, mais aussi n complément d’intervention et de sécurisation.
« Nous avions planché su un large spectre de situations avant Bombay, souligne Jean-Jacques Herlem. Et ces événements  en Inde ont renforcé  notre idée qu’il fallait encore mettre de la cohésion dans tout le dispositif que nous pourrions être amenés à mobiliser en cas de crise. Car, au-delà de la BAC historique, la préfecture de police peut mettre en œuvre des unités homogènes qui viendront en appui ».
On trouve des éléments que la BRI connaît bien pour travailler régulièrement avec elle, comme le maître-chien de la DPUP, l’hélicoptère mis en œuvre par la Sécurité Civile pour la direction de la logistique (DOSTL), les embarcations et les plongeurs de la brigade fluviale, et la compagnie de sécurisation de la police urbaine de proximité (DPUP).
Le maître-chien, et son fidèle opérateur à quatre pattes, est indispensable pour les assistances PJ, mais aussi en formation BAC comme la BRI, l’a démontré au grand public lors des dernières journées de la Sécurité Intérieure (JSI).
Avec la brigade d’intervention et, plus largement, la compagnie spéciale d’intervention (CSI), c’est aussi une capacité d’action importante en matière de varappe, et dévolution dans les égouts et carrières, une compétence unique… Ses tireurs (voir Police Pro n°12) sont quasi quotidiennement requis pour tenir les points haut dans la capitale,  pour veiller sur la sécurité du président de la république ou  pour étanchéifier une bulle autour d’une personnalité étrangère de passage en France.
La compagnie de sécurisation fut la première du genre en France, et fut initiée au sein de la police urbaine  de proximité comme, justement , une force spécialisée  pour intervenir sur des situations ne relevant pas directement de la gestion de l’ordre public, le territoire de la DOPC, l’autre grande direction parisienne.
Autre avantage, cette force composite dispose d’appuis particulièrement développés. La DRPJ déploie ainsi depuis trois ans une cellule d’assistance technique (CAT) bien équipée,  notamment en capteurs (vidéo, géolocalisation, etc.). La direction de la logistique  peut aussi largement  contribuer à l’efficacité  du dispositif, avec des véhicules spécialisés (lance-eau, porte-lames, etc). Son hélicoptère est précieux dans les deux  secteurs couverts par la BRI. En mission PJ, il peut permettre de « filocher » depuis les airs un véhicule suspect (un go-fast par exemple), mais aussi d’effectuer des reconnaissances de points d’interpellation.
La caméra qui équipe l’EC 145- et , dans une moindre mesure, l’Alouette III- a des partisans et des détracteurs, mais , en l’espèce, elle permet de prendre de la vidéo de nuit.
Le fait que la PP refuse systématiquement la médiatisation de cet engin est peut-être aussi la traduction  de son envie de ne pas trop en dire sur ce précieux moyen. En intervention, l’hélicoptère peut aussi produire du renseignement , mais aussi et avant tout héliporter un dispositif réduit.
L’alouette permettait d’emporter trois (en cas d’aérocordage) ou quatre commandos  (deux sur chaque patin, en cas de poser). Avec l’EC 145, ce sera un peu plus, mais à peine : la capacité théorique de la soute est de huit passagers, mais un commando de la BRI équipé pèse plus que le « vulgum pecus » , donc on peut penser que la capacité maximale n’excédera pa six hommes.
Actuellement, l’EC145 de la PP ne dispose pas encore de potences d’aérocordage ( à priori enfin financées).
Seul aspect à débrouiller dans cette force, justement, son caractère composite. Déjà, les entraînements de la BAC-BRI sont très irréguliers. Or, l’efficacité d’unités d’intervention repose bel et bien sur une connaissance mutuelle, et une reconnaissance  mutuelle.
Sans doute un sujet d’envergure pour forger la cohésion d’ensemble.
 

Tiré de Police Pro n°15 – Mai Juin 2009

Article de Jean-Marc Tanguy

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