Les policiers surentraînés du RAID nous ont récemment accueillis dans leur QG en périphérie de Rennes. L’occasion d’évoquer leur quotidien et leurs missions.
 
Vous ne verrez pas leurs visages. La cagoule noire est la meilleure garantie de leur anonymat.
Ces hommes font partie de l’unité la plus secrète de la police française : le RAID (acronyme de Recherche-Assistance-Intervention-Dissuasion), créé en octobre 1985 suite à une vague d’attentats.
 

500 interventions par an

Le RAID, ce sont près de 500 interventions par an en France.
Parmi les interventions les plus marquantes de ces dernières années qui ont fait les gros titres  : les neutralisations du preneur d’otages (Human Bomb) dans une école maternelle de Neuilly et du terroriste Mohamed Merah en mars 2012 qui avait tué 7 personnes à Toulouse et Montauban.
Ou encore celle d’Amédy Coulibaly en janvier 2015 dans l’attaque de l’Hypercacher.
Sans oublier la traque d’Yvan Colonna condamné pour le meurtre du préfet Erignac.

 

 
Sélection et formation exigeantes
L’unité compte environ 400 membres en France, dont une vingtaine sur Rennes, mobilisables 24 heures sur 24.
L’ex-antenne régionale du GIPN, intégrée en 2015 au sein du RAID, intervient dans tout le grand Ouest.
 
Notre mission première est de faire face à la menace terroriste. Mais cette unité est aussi sollicitée pour d’autres interventions. Il y a les prises d’otage, la neutralisation de forcenés et puis des opérations programmées, les interpellations de malfaiteurs dangereux et armés lors d’enquêtes, notamment dans le cadre de trafic de stupéfiants ou encore le soutien au dispositif de sécurité lors de visites officielles.” – Commandant N. à la tête du RAID de Rennes
 
Tous les hommes qui composent l’unité ont été recrutés à l’issue d’une rude sélection et formés de la même manière.
Ils opèrent avec la même tactique. Ce qui permet de mixer des colonnes quand le besoin s’en fait sentir.
L’unité compte également dans ses rangs des médecins urgentistes qui se relaient pour monter des astreintes.
 
En 2020, le RAID de Rennes a réalisé une soixantaine d’interventions dont 2 dans la Manche, sur Cherbourg-en-Cotentin (en juillet et septembre) pour des hommes retranchés à leur domicile. En moyenne, ils procèdent à entre 60 et 80 interpellations par an (entre 8 et 15 forcenés).
 

35 kg sur le dos
Négociation, sniper, effraction, expert en technique de cordes : dans l’équipe, chaque opérateur a son rôle.
Lors de chaque intervention, les hommes portent en moyenne entre 30 et 35 kg de matériel sur le dos.
Gilet pare-balles et casque balistique lourd, armement, chargeurs, fumigènes…
L’équipement, ce sont aussi des boucliers d’une trentaine de kilos qu’il faut tenir parfois à bout de bras, un bélier ou encore quelques bijoux de technologie : un endoscope et sa caméra à fibre optique (permettant de visualiser l’intérieur d’une pièce sans y pénétrer), un vérin hydraulique capable d’ouvrir n’importe quelle porte blindée, des drones… sans oublier les véhicules blindés.
Les membres du RAID ont à leur disposition un impressionnant arsenal, de tous les calibres.
Du petit pistolet automatique au fusil d’assaut équipé de visée laser en passant par l’arme de précision capable de faire mouche à plusieurs centaines de mètres.
Sans oublier le taser et le fusil à pompe d’ouvertures en force, spécialement modifié pour forcer les portes. « Rien ne lui résiste. »
 
Pouvoir faire face à toutes les situations
Les policiers du RAID sont des sportifs aguerris.
Quand le groupe n’est pas en mission, il est à l’entraînement.
Ce qui frappe d’emblée en découvrant la salle de sport de l’unité bien équipée, ce sont les carrures impressionnantes des fonctionnaires.
Mais ce n’est pas le muscle qui prime.
 
Il faut être prêt à faire face dans toutes les situations. Et la condition physique est un élément important. Mais nous révisons aussi inlassablement tout le panel de nos techniques d’intervention. On fait en sorte de ne jamais être pris au dépourvu.
 
Négocier, tout un art
Dans une salle à l’étage du bâtiment, des opérateurs simulent une négociation avec un forcené retranché à l’autre bout du téléphone.
L’homme vient de tuer sa femme et menace de mettre fin à ses jours.
Sur un tableau, un certain nombre d’informations ont été recueillies sur l’entourage de l’individu menaçant.
La voix du négociateur expérimenté est posée. Les mots choisis.
 
Nous avons fréquemment des exercices avec nos collègues parisiens. Les scénarios varient. Les négociateurs (ils sont 4) répètent constamment puis débriefent en visioconférence. Le négociateur doit avoir une empathie naturelle. L’ouverture vers les autres ne s’apprend pas. On l’a ou on ne l’a pas. Le plus compliqué est de nouer le contact. Lors d’une intervention, le négociateur essaie de tisser un lien avec le forcené ou le preneur d’otage pour désamorcer une situation critique.” – Le commandant de l’antenne régionale
 

Un Cherbourgeois au sein du RAID
Dans les rangs de l’antenne régionale, on retrouve Pierre, 52 ans, un policier originaire de Cherbourg qui totalise vingt-deux années au sein du service.
Je suis sorti de l’école de police en 1994. J’ai choisi d’intégrer une compagnie républicaine de sécurité. J’ai été affecté à la CRS 8 de Bièvres qui est implantée sur le site historique du RAID. Cela m’a permis de découvrir l’unité et l’aspect opérationnel de son service. Très rapidement, j’ai eu pour objectif de l’intégrer.” – Pierre
Après ses trois ans passés en CRS, il est revenu sur Cherbourg pour des raisons familiales.
 
J’ai passé une année au commissariat, en sécurité publique. En parallèle, je me suis donné les moyens de passer les sélections, à l’époque à Saint-Malo. Une année de préparation physique. Beaucoup de mes collègues pensaient que je n’y parviendrais pas. Je leur ai prouvé le contraire, qu’on pouvait aller au bout de ses rêves. J’ai fini premier des sélections. Et aujourd’hui, c’est une fierté d’appartenir au RAID et d’avoir eu ce parcours.” – Pierre
 
À ses débuts sur Rennes, Pierre était simple opérateur. Il a ensuite pris la spécialité de tireur de précision. Puis l’effraction.
Au bout de six ou sept ans de service, il est passé chef d’équipe.
Et depuis deux ans, le Cherbourgeois occupe les fonctions d’adjoint au commandant de l’unité.
 
Il faut des gens avec un certain profil physique, un mental d’acier. Athlète de haut niveau ne suffit pas forcément. Nous recherchons du rustique. Nous pratiquons dans l’inconfort. Nous sommes capables de rester des heures sur une même position, par tous les temps. Avec de la fatigue. Le sportif qui est réglé, millimétré, avec son repas à telle heure, a peu de chance de réussir.” – Pierre, numéro deux du RAID de Rennes
 
Solidaires et parfois confrontés à des situations extrêmes, les hommes du RAID ont tissé des liens très forts au fil du temps.
 
Au niveau de l’unité, les motivations sont diverses mais pour durer et trouver sa place, il faut être capable de penser collectif. Individuellement, vous allez apporter à l’unité mais c’est le groupe qui fait la force. C’est la complémentarité de chacun qui fait la beauté de ces unités. C’est un rouleau compresseur. Une machine qui ne recule pas. On a pu s’en rendre compte lors des tristes événements de l’Hyper Cacher en 2015. C’est une puissance qu’on retrouve avec le collectif.
 
Le collectif, le dépassement de soi, l’engagement, la technicité… Autant de valeurs que Pierre apprécie dans son unité du RAID.”
 
 
 
Source : Actu.fr – article écrit le 21 janvier 2021 par Ludovic Ameline
Photos © Ludovic Ameline
 

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